Les deux usines du lieu-dit « Aux Usines » furent construites dans la seconde moitié du 17e siècle. Elles étaient épaulées par au moins 4 forges de canonniers. Si la dénommée « Petite usine » avait 3 bancs d'alésage, on peut penser que ladite « Grande usine » en contenait au moins quatre. Une troisième usine fut créée entre 1747 et 1772 dans l'enclave de Soiron à Olne-Chinhotte. En 1801, 16 ouvriers travaillaient dans cette usine; comme un banc d'alésage donnait du travail pour quatre personnes, on peut en conclure qu'il y avait 4 tours dans le bâtiment. Les forges de canonniers étaient composées d'un à 3 fourneaux. Les deux usines de Soiron avaient la même capacité de production. Déjà en février 1673, l'usine de Goffontaine produisait 800 canons par mois, ce qui correspond à ± 10000 canons par an. En 1801, elles pouvaient employer chacune 16 ouvriers, l'usine de Goffontaine était à l'arrêt, celle de l'enclave à Olne-Chinhotte produisait 36 gros canons de fusil par jour, donc ± 10000 canons par an. Les trois usines d'Olne-Chinhotte avaient donc une capacité de production de ± 27500 canons par an. Rappel de la fabrication du canon de fusil du XVIe au XVIIIe siècle. Le canon de fusil était formé à partir d'une lame de fer fabriquée dans les usines à battre les métaux (maka ou martinet). Le forgeron enroulait longitudinalement cette bande de fer autour d'un mandrin, puis soudait les deux côtés de la lame. Le tube, ainsi obtenu, était alésé au tour, dressé, puis blanchi par l'émouleur. Ce canon est appelé le « canon-platine ». Méthode de la fabrication du canon-damas Au début du 19e siècle, une autre méthode de fabrication vit le jour. La lame de fer fut remplacée par un ruban métallique que l'on enroula en spirale autour d'un mandrin. La soudure longitudinale du « canon-platine » fut remplacée avantageusement par une soudure hélicoïdale, ce qui renforça la solidité du canon. Volontairement ou par nécessité due à la pénurie de matières premières, on introduisit du fer et de l'acier (débris de toutes espèces) dans la composition du ruban. Ce mélange et le martelage à chaud du ruban donnèrent au canon une surface damassée à dessins irréguliers. On l'appela le « canon-ruban-damassé ». Cette surface damassée, au dessin aléatoire, ne permettait pas aux canonniers de s'exprimer artistiquement. Ils utilisèrent alors une méthode de fabrication beaucoup plus élaborée où la composition et la confection du ruban pris une importance considérable. |
Le ruban sera obtenu par l'assemblage de 2 à 6 baguettes tordues, chauffées et soudées par martelage. La baguette était préparée à partir d'une masse composée de barres de fer et d'acier. La forme, l'épaisseur et la disposition de ces barres étaient déterminées par le canonnier. Cette masse sera ensuite passée au laminoir afin d'obtenir une baguette de section carrée de 5 à 9 m/m d'épaisseur. Chauffée au rouge, la baguette était ensuite torsadée de façon régulière sur toute sa longueur. Après avoir été formé, alésé, dressé et blanchi, le canon sera décapé à l'acide sulfurique pour faire ressortir le dessin du damas. Ce procédé, fort coûteux, était réservé aux fusils de luxe, principalement aux armes de chasse. |
Damas Léopold Heuse |
La confection des canons de fusil en damas donna à la forge une place privilégiée dans le processus de la fabrication des canons. Leur nombre augmenta très rapidement, notamment à Olne-Chinhotte. Le cadastre primitif d'Olne de 1833 relève 4 forges pour braser les canons de fusil, mais les actes notariés de 1837 et 1838 attestent d'une présence d'au moins 14 forges à Olne-Chinhotte, dont 6 ont été construites en 1835. Cette brusque augmentation pourrait confirmer la généralisation de la fabrication des « canons-damas » vers 1835. Ernest HEUSE-LEMOINE, président de l'Union des fabricants de canons de la vallée de la Vesdre, qui défendait cette date, est né à Olne-Chinhotte le 19 janvier 1834. Vaux-sous-Olne, dont Olne-Chinhotte et Thovoie sont le berceau des maîtres usiniers tels que : MORAY-PIRARD, MORAY-GORLIER, HEUSE-LEMOINE, HEUSE-RIGA. Leurs canons en damas ont été vendus, par milliers, dans tous les pays industrialisés. Quelques citations Joseph FRAIKIN, directeur (1908-1946) du banc d'épreuve de Liège : « Les canonniers de Nessonvaux, HEUSE-RIGA, HEUSE-LEMOINE et DELCOUR éclipsèrent ceux de Paris et de Saint-Etienne (Armurerie liégeoise, juin 1931). Exposition Universelle et Internationale de Paris, 1900 : « Malgré la faveur accordée aujourd'hui aux canons d'acier, la fabrication des canons en damas de M. Heuse-Lemoine, à Nessonvaux, conserve une telle perfection, ses produits jouissent encore à Liège et à l'étranger d'une telle réputation, que le jury de 1900 n'a pas hésité à lui accorder, comme celui de 1889, une récompense exceptionnelle », c'est-à-dire, un « Grand prix unique » pour les canons. BERNARD et Cie, 1906 : « Tout le monde connaît les célèbres canons damas Crollé Heuse-Lemoine. Pour la fabrication des damas, c'est la première firme du monde entier ». Le système « BERGER » mit fin à la fabrication artisanale des canons de fusil. Dorénavant, le canon sera produit en perçant dans la masse une barre d'acier. Suite >
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